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Archives Mandragoriennes
4 mars 2007

Le monde des entreprises est devenu multipolaire

Les Etats-Unis sont le pays de référence du monde des affaires Partout et de plus en plus, les dirigeants économiques parlent anglais, ont un MBA en poche et communiquent leurs idées sur PowerPoint. Depuis un demi-siècle, les innovations techniques et managériales essentielles viennent d'outre-Atlantique. Le  Japon s'est affirmé dans les années 80, mais l'éclatement de sa bulle financière l'a ensuite plongé dans la léthargie. Particulièrement depuis les années Clinton et la révolution Internet, l'Amérique domine sans partage les territoires de l'innovation et de la création économique, grâce notamment aux joyaux universels que constituent ses meilleurs universités.

En revanche, dans les rapports de force entre grands groupes, la domination étasunienne s'érode à une vitesse surprenante. Le graphique est réalisé à partir du recensement effectué depuis la fin 2003 par le Financial Times des 500 premières entreprises cotées dans tous les pays du monde (FT Global 500), classées  selon leur capitalisation boursière au taux de change de fin d'année.
Ces entreprises, dont la liste change bien sûr à chaque renouvèlement de l'exercice, sont trièes en cinq zones géographiques en fonction de la localisation de leur siège. A chaque fin d'année, le poids cumulé des capitalisations correspondantes est calculé pour chaque zone.

La tendance qui saute aux yeux est la baisse rapide et continue de la part des groupes
étasuniens , alors même que Wall Street a été trés prospère durant cette période: moins 13 points en trois ans, même si les Etats-Unis sont toujours au premier rang. Il ne s'agit pas d'un effet de change. La parité Euro/Dollar, notamment, est restée assez stable: 1,26 fin 2003, 1,36 fin 2004, 1,18 fin 2005 et 1,32 fin 2006.

Par ailleurs, les Etats-Unis gardent l'avantage des toutes premières places. Le trio de tête est invariable: ExxonMobil, General Electric et Microsoft. Citigroup est quatrième depuis 2004 (en 2003 cette place était revenue à Pfizer ). La tendance s'explique t-elle par la hausse des prix du pétroles et des matières premières? Contrairement à un préjugé répandu, le "Big Oil" n'est pas le point fort des Etats-Unis: fin 2006, les valeurs pétrolières et minières représentent 31% de la valeur cumulée des entreprises "émergentes" du FT Global 500, 14% des Européennes, mais moins de 9% des
 étasuniennes. Cela étant, ce ratio est de 35% pour la zone Australie-Canada, mais la part totale de celle-çi n'augmente que modérément.    

En fait, le facteur majeur, en miroir du déclin relatif des Etats-Unis, est la montée en puissance rapide des entreprises cotées des pays émergents, qui incluent un nombre important d'introductions en Bourses récentes. A fin 2006, Gazprom est la cinquième capitalisation mondiale, Industrial & Commercial Bank of China est la deuxiéme valeur bancaire derrière Citigroup, et China Mobile est numéro un mondial des télécoms.  Certaines valorisations sur des marchés peu liquides, comme celui de Shanghai, sont certes sujettes à caution, mais cet effet est de second ordre. Et encore, il ne s'agit que de la partie émergée de l'iceberg. Si on ajoute les entreprises non cotées (valorisées à fin 2005 par Mc Kinsey, dans une étude publiée par le Financial Times le 15 décembre 2006, et en appliquant ujne augmentation forfaitaire de 20% pour tenir compte de la hausse des cours en 2006), la part des groupes émergents grimpe à 23%, contre 29% pour les Européens et seulement 36% pour les
étasuniens .


Le monde des entreprises est multipolaire. La bonne performance européenne dans ce contexte semble due avant tout à une forte dynamique de consolidation, sans doute stimulée  par le marché unique et et l'euro.  En Europe, les entreprises petites et moyennes ont du mal à accéder aux financements externes, et ceci explique sans doute une part de notre problème de croissance. Mais les grands groupes européens arrivent remarquablement bien à se constituer en "champions" mondiaux, et à tenir leur rang face au déclin relatif de leurs homologues d'outre-Atlantique

tribune









La tribune
19 février 2007

Nicolas Veron
Economiste au centre de réflexion européen Bruegel
Associé de la société de conseil Ecif

  

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